Jacques Weber, tout et rien

« Le public, c’est un taureau. Si tu n’es pas bon, il t’encorne. » Et si le taureau, c’était lui ? 73 ans, 55 ans de carrière, 130 kilos… Jacques Weber, bête de scène.

Un corps massif, une grande gueule à grosse voix, une machine à vapeur alimentée au bois de tirades, une vie à cramer les planches et à faire trembler les écrans… Il aurait pu brouter paisiblement son pré carré, en vache sacrée du jeu. En 2023, plus que jamais pourtant, il se jettera dans l’arène, enchaînant pas moins de cinq projets théâtraux à travers toute la France. En se ruant sur tout l’arc de la comédie, du classique Shakespeare en Roi Lear au si contemporain Pascal Rambert… Parce qu’après avoir interprété tous les grands rôles du répertoire, Jacques Weber en a fini avec la recherche de la popularité et les illusions médiatiques.

Sa quête désormais est ailleurs. On le dit sensuel, boulimique, dionysiaque, impatient, il se révèle inquiet, contemplatif, traqueur, obsédé par son métier…

À l’apogée, et donc au crépuscule, de sa carrière et de sa vie, mesurant sa démesure et domptant sa nature, il cherche le jeu et le je par l’épure. Pour la première fois, il a accepté d’être filmé au plus près de la pratique de son artisanat. Ce film le suit des Bouffes du Nord à Paris à la Criée de Marseille, du TNB de Rennes à la Scala d’Avignon, en répétitions, en lectures, dans les loges et coulisses, sur les plateaux, en tournées, dans le repli de son repaire de Suresnes… Un road movie intimiste et impressionniste sur les traces d’un géant fragile face aux vertiges d’un art enfantin : l’art de jouer.